Poésie :

Sommaire : Rhodine, Eugène Pottier, Bertold Brecht, Hô Chi Minh, Karl Marx, Ernst Busch

Rhodine

(mars 2003, www.communisme.ch)

Eugène Pottier

Bourdonnement

Je possède
Tu possèdes
Il possède
Nous possédons
Vous possédez - Ils volent

 

Je caresse
Tu caresses
Il caresse
Nous caressons
Vous caressez - Ils frappent

 

Je marche
Tu marches
Il marche
Nous marchons
Vous marchez - Ils écrasent

 

Je parle
Tu parles
Il parle
Nous parlons
Vous parlez - Ils ordonnent

 

Je t'embrasse
Tu m'embrasses
Il t'embrasse
Nous nous embrassons
Vous vous embrassez - Ils étranglent

 

Je contemple
Tu contemples
Il contemple
Nous contemplons
Vous contemplez - Ils surveillent

 

Je t'aime
Tu m'aimes
Il t'aime
Nous nous aimons
Vous vous aimez - Ils violent

 

Je vis
Tu vis
Il vit
Nous vivons
Vous vivez - Ils tuent

 

Je me révolte
Tu te révoltes
Il se révolte
Nous nous révoltons
Vous vous révoltez
ILS DISPARAISSENT !

Millénaire

Millénaire décuplé
Siècles d'espérances
Millénaire découpé
Siècles de souffrances

 

Enfant des inventions
Découvrant l'espace
Dévorant générations
Anéantissant les races

 

Développant les industries
Les marteaux deviennent des sabres
Les canons remplacent la soie
Un mousquet pour  un candélabre

 

Labourant la terre
Succédant aux charrues
Labourant les chairs
Tombent les obus

 

Peuple immense perdu
Troupeau de moutons
Peuple immense vendu
Suivant ses patrons

 

Là où tombe la terre en mottes
Commence la valse des despotes
Imbus de leur puissance
Gonflant le tors ils tonnent

 

Prétextant des idées
Pour envoyer leurs armées
Ils se donnent pour tâche
De remettre le peuple en marche

 

Guignols, ils encensent la Nation
La consolident comme une maison
Le mensonge est d'autant plus grand
Que la haine en est le ciment

 

Labourant la terre
Succédant aux charrues
Labourant les chairs
Tombent les obus

 

Existe-t-il une île
Dans cette foule mercantile ?
Y aurait-il une main
Pour me mener à l'humain ?

 

Femmes ! Hommes ! Relevez-vous !
On ne voit le monde que debout
Il n'est pas de forêt sans clairière
Il n'est pas de monde sans lumière !

 

Labourant la terre
Succédant aux canons
Réparant la chair
Dites enfin NON !

L'économie politique

De tous les droits que l'homme exerce
 Le plus légitime au total
 C'est la liberté du commerce
 La liberté du Capital
 La loi c'est "l'offre et la demande"
 Seule morale à professer
 Pourvu qu'on achète et qu'on vende
 Laissez faire, laissez passer !

 Et que rien ne vous épouvante
 Car y glissa-t- il du poison
 Si le marchand triple sa vente
 Il prouve net qu'il a raison
 Que ce soit morphine ou moutarde
 Truc chimique à manigancer
 C'est l'acheteur que ça regarde
 Laissez faire, laissez passer !

 Les travailleurs ont des colères
 Dont un savant n'est pas touché
 Il faut bien couper les salaires
 Pour arriver au bon marché
 Par un rabais de deux sous l'heure
 Des millions vont s'encaisser
 Et puis croyez-vous qu'on en mesure
 Laissez faire, laissez passer !

 Pour le bien des corps et des âmes
 Doublons les heures de travail
 Venez enfants filles et femmes
 La fabrique est un grand bercail
 Négligez marmots et ménage
 Ca presse pour vous prélasser
 Vous aurez des mois de chômage
 Laissez faire, laissez passer !

 L'étranger a l'article en vogue
 Trouve un rapide écoulement
 N'écoutons pas ce démagogue
 Qui nous prédit l'engorgement
 Il faut bravant ces balourdises
 En fabriquant à tout casser
 L'inonder de nos marchandises
 Laissez faire, laissez passer !

 Par essaims, le chinois fourmille
 Ils ont des moyens bien compris
 Pour s'épargner une famille
 Et travailler à moitié prix
 Avis aux ouvriers de France
 Dans leur sens, il faut s'exercer
 Pour enfoncer la concurrence
 Laissez faire, laissez passer !

 Sous le Siège dans la famine
 J'ai défendu la liberté
 Voulant fidèle à la doctrine
 Rationner par la cherté
 Chaque jour et sans projectile
 Par vingt mille on eut vu baisser
 Le stock des bouches inutiles
 Laissez faire, laissez passer !

 Qu'on accapare la denrée
 Qu'on brûle greniers magasins
 Que pour régler des droits d'entrée
 On se bombarde entre voisins
 Que le faible soit la victime
 Bonne à tromper piller sucer
 L'économie a pour maxime
 Laissez faire, laissez passer !

 29 juillet 1880

La charogne

Je vis une charogne abjecte,
Foyer de miasmes corrompus,
Empire normal de l'insecte,
Tas fourmillant de vers repus.

Chacun d'eux se gorgeait de pus
Comme un viveur qui se délecte.
Fourche en main, du mieux que je pus
J'éloignai cette masse infecte.

Mais alors, dans leurs puanteurs,
Les asticots conservateurs
Hurlent en choeur la même phrase :

" Respect à la propriété !
Venez-vous saper par la base
L'éternelle Société ? "

New York, 1875

L'Internationale

C'est la lutte finale :
Groupons-nous, et demain,
L'Internationale
Sera le genre humain.

Debout ! les damnés de la terre !
Debout ! les forçats de la faim !
La raison tonne en son cratère,
C'est l'éruption de la fin.
Du passé faisons table rase,
Foule esclave, debout ! debout !
Le monde va changer de base :
Nous ne sommes rien, soyons tout !

Il n'est pas de sauveurs suprêmes:
Ni Dieu, ni César, ni tribun,
Producteurs, sauvons-nous nous-mêmes !
Décrétons le salut commun !
Pour que le voleur rende gorge,
Pour tirer l'esprit du cachot,
Soufflons nous-mêmes notre forge,
Battons le fer quand il est chaud !

L'État comprime et la loi triche ;
L'Impôt saigne le malheureux ;
Nul devoir ne s'impose au riche ;
Le droit du pauvre est un mot creux.
C'est assez languir en tutelle,
L'Égalité veut d'autres lois ;
"Pas de droits sans devoirs," dit-elle,
"Égaux, pas de devoirs sans droits !"

Hideux dans leur apothéose,
Les rois de la mine et du rail
Ont-ils jamais fait autre chose
Que dévaliser le travail :
Dans les coffres-forts de la bande
Ce qu'il a créé s'est fondu.
En décrétant qu'on le lui rende
Le peuple ne veut que son dû.

Les rois nous soûlaient de fumées,
Paix entre nous, guerre aux tyrans !
Appliquons la grève aux armées,
Crosse en l'air et rompons les rangs !
S'ils s'obstinent, ces cannibales,
A faire de nous des héros,
Ils sauront bientôt que nos balle
Sont pour nos propres généraux.

Ouvriers, paysans, nous sommes
Le grand parti des travailleurs ;
La terre n'appartient qu'aux hommes,
L'oisif ira loger ailleurs.
Combien de nos chairs se repaissent !
Mais, si les corbeaux, les vautours,
Un de ces matins, disparaissent,
Le soleil brillera toujours !

C'est la lutte finale :
Groupons-nous, et demain,
L'Internationale
Sera le genre humain.

Juin 1871

Bertold Brecht

(www.webzinemaker.net/bribedevie)

Hô Chi Minh

 

Chanson de la faucille et du marteau

C’est pour nous construire une vie
Que nous avons chassé nos maîtres
Et tracé sur nos drapeaux rouges
Fièrement faucille et marteau.
Faucille et marteau, voilà nos outils !
U.R.S.S. notre travail ça tient.
Pour les opprimés de tous les pays,
C’est une forteresse dans le monde.

Ils seront, eux, très étonnés
De ce qui se passera si
Nous les voyons mettre leur groin
Dans notre jardin soviétique.
Faucille et marteau sont plus qu’un outil !
Et si vers l’Est ils tournent leurs canons,
Sur eux le marteau tombera sifflant
Et la faucille en deux les coupera !

Veille

Une veille...

une veille...

une troisième veille...

Pas moyen de dormir...

Je me tourne, angoissé...

Quatre, cinquième veille...

est-ce un rêve ?

Est-ce une veille ?

Cinq branches d'une étoile enroulent mes pensées.

 

Karl Marx

HEGEL.  ÉPIGRAMME

 

(1837)

 

I

 

Weil ich das Höchste entdeckt und die Tiefe sinnend gefunden,

Bin ich grob, wie ein Gott, hüll' mich in Dunkel, wie er.

Lange forscht' ich und trieb auf dem wogenden Meer der Gedanken,

Und da fand ich das Wort, halt' ich am Gefundenen fest.

 

II

 

Worte lehr' ich,gemischt in dämonisch verwirrtem Getriebe,

Jeder denke sich dann, was ihm zu denken beliebt.

Wenigstens ist er nimmer geengt durch fesselnde Schranken,

Denn wie aux brausender Flut, stürzend vom ragenden Fels,

Sich der Dichter ersinnt der Geliebten Wort und Gedanken,

Und was er sinnet, erkennt, und was er fühlet, ersinnt,

Kann ein jeder sich saugen der Weisheit labenden Nektar,

Alles sag' ich euch ja, weil ich ein Nichts euch gesagt !

 

III

 

Kant und Fichte gern zum Aether schweifen,

Suchten dort ein fernes Land,

Doch ich such' nur tüchtig zu begreifen,

Was ich auf der Strasse fand !

 

IV

 

Verzeiht uns Epigrammendingen,

Wenn wir fatale Weisen singen,

Wir haben uns nach Hegel einstudiert,

Auf sein' Aesthetik noch nicht

abgeführt.

HEGEL. ÉPIGRAMME

 

Traduction

 

I

 

Puisque j'ai découvert le sublime et trouvé, en méditant, la profondeur,

Je suis grossier, tel un Dieu et, comme lui, je m'enveloppe de mystère.

Longtemps j'ai cherché et erré sur la mer démontée des pensées,

Lors j'ai trouvé le Verbe, et me tiens ferme à ma trouvaille.

 

II

 

J'enseigne des mots, pris dans une agitation, dans un pêle-mêle démoniaque ;

Que chacun pense alors ce qu'il lui plaît de penser.

Jamais, du moins, il n'est gêné par des limites, par des chaînes,

Car, tel le poète devant le torrent mugissant qui se précipite du rocher escarpé,

 S'imagine la parole et la pensée de sa bien-aimée,

Et reconnaît ce qu'il imagine, et invente ce qu'il ressent,

Chacun peut à son gré sucer le nectar bienfaisant de la sagesse :

Sachez que je vous dis Tout, puisque je vous ai dit un Rien !

 

III

 

Kant et Fichte voguent volontiers vers l'éther,

Ils y ont cherché une Terre lointaine,

Mais moi, je cherche seulement à comprendre

Ce que j'ai trouvé... dans la rue !

 

IV

 

Pardonnez-nous ces méchantes épigrammes,

Et de chanter des airs funestes ;

Nous nous sommes instruits selon Hegel,

Et grâce à son Esthétique nous voulons encore nous —

purger.

Ernst Busch

 

Lied der Partei

(1950)

Sie hat uns alles gegeben.
Sonne und Wind und sie geizte nie.
Wo sie war, war das Leben.
Was wir sind, sind wir durch sie.
Sie hat uns niemals verlassen.
Fror auch die Welt, uns war warm.
Uns schützt die Mutter der Massen.
Uns trägt ihr richtiger Arm.

Die Partei, die Partei, die hat immer Recht !
Und, Genossen, es bleibe dabei ;
Denn wer kämpft für das Recht,
Der hat immer recht.
Gegen Lüge und Ausbeuterei.
Wer das Leben beleidigt,
Ist dumm oder schlecht.
Wer die Menschheit verteidigt,
Hat immer recht.
So, aus Leninschem Geist,
Wächst, von Stalin geschweißt,
Die Partei - die Partei - die Partei.

Sie hat uns niemals geschmeichelt.
Sank uns im Kampfe auch mal der Mut,
Hat sie uns leis nur gestreichelt,
zagt nicht und gleich war uns gut.
Zählt denn noch Schmerz und Beschwerde,
wenn uns das Gute gelingt.
Wenn man den Ärmsten der Erde,
Freiheit und Frieden erzwingt.

Die Partei, die Partei, die hat immer Recht !
Und, Genossen, es bleibe dabei ;
Denn wer kämpft für das Recht,
Der hat immer recht.
Gegen Lüge und Ausbeuterei.
Der das Leben beleidigt,
Ist dumm oder schlecht.
Wer die Menschheit verteidigt,
Hat immer recht.
So, aus Leninschem Geist,
Wächst, von Stalin geschweißt,
Die Partei - die Partei - die Partei.

Sie hat uns alles gegeben,
Ziegel zum Bau und den großen Plan.
Sie sprach Meistert das Leben,
Vorwärts Genossen packt an.
Hetzen Hyänen zum Kriege,
Bricht euer Bau ihre Macht,
Zimmert das Haus und die Wiege,
Bauleute seid auf der Wacht.

Die Partei, die Partei, die hat immer Recht !
Und, Genossen, es bleibe dabei ;
Denn wer kämpft für das Recht,
Der hat immer Recht.
Gegen Lüge und Ausbeuterei.
Der das Leben beleidigt,
ist dumm oder schlecht.
Wer die Menschheit verteidigt,
Hat immer recht.
So, aus Leninschem Geist,
Wächst, von Stalin geschweißt,
Die Partei - die Partei - die Partei.

 

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